Bonjour,
Lecteur des Echos de longue date, j'apprécie vraiment le sérieux et la qualité du journal.
Je souhaitais réagir à l'édition du 30 novembre dernier qui faisait la part belle au lancement de Vista, le nouveau logiciel de Microsoft.
Sans évoquer le fond des articles consacrés à ce lancement (1), je m'étonne que la publication à « la une » du journal d'un « camembert » illustrant les parts de Microsoft dans le marché des systèmes d'exploitation ne donne lieu à aucune réaction ni enquête de votre part.
En effet, ce camembert figure :
- en bleu médium, la part de Microsoft Windows dans le marchés des systèmes d'exploitation,
- en bleu foncé celle de Linux,
- en jaune celle de MacOS
Bizarrement le camembert et quasiment entièrement bleu médium (Windows représentarait 95,9 % de parts de marché contre 1,6 % pour Linux et 2,5 % pour MacOS)
Ce monopole de fait, assez inédit dans les autres secteurs économiques traités quotidiennement par le journal, et plus généralement en économie de marché, ne semble pas vous étonner le moins du monde, puisque vous ne relevez à aucun moment l'incongruité de la chose.
Il me semble qu'il y a pourtant là matière à se demander, spécialement pour un journal qui se targue d'être « le quotidien de l'économie », comment une société peut parvenir à capter la quasi-totalité de la clientèle de son secteur en économie de marché.
Il me semble que si les logiciels étaient chacun de qualité et que les règles de la concurrence étaient respectées, on aboutirait à un partage de marché beaucoup plus équilibré, comme dans les autres secteurs de l'économie...
Personnellement je pense que les trois logiciels cités sont de qualité globalement équivalente (chacun ayant des qualités et inconvénients), ce que la lecture de la presse spécialisée tend à confirmer.
En outre, il est peu probable que l'existence d'un marché aussi important n'ait pas conduit à l'émergence de produits de qualité équivalente, c'est à dire concurrentiels.
Il est donc légitime de se demander si les règles de la concurrence sont bien respectées dans ce secteur.
Sans revenir sur le jeu des pressions exercées par la société Microsoft sur les fabriquants d'ordinateurs révélées lors des procès anti-trust ou sur la puissance de feu commerciale et de lobbying de la société Microsoft, on pourra tout de même se demander si les liens commerciaux douteux tissés entre la société Microsoft et l'Education Nationale (qui font de cette dernière le meilleur agent commercial de la société Microsoft en accoutumant dès leur plus jeune âge les élèves de la République aux produits de la société Microsoft) (2) ou si la pratique - érigée au rang de système - de la vente liée, véritable racket organisé (3), ne permettent pas ensemble à la société Microsoft d'évincer artificiellement toute tentative de concurrence sur son marché.
J'aurais pu également citer la tentative (en cours) de contrôle de la chaîne informationnelle par les formats fermés de la maison Microsoft : formats audio/video avec les codecs Windows Media Audio et Video et le système de gestion numérique des droits Windows Media Digital Rights Management, lancement d'un concurrent au format ouvert PDF d'Adobe, formats .doc et autres de la suite bureautique Microsoft Office (4)... Ces formats sont d'abord diffusés par Microsoft en prenant appui sur le monopole détenu par la société sur le marché des systèmes d'exploitations puis requièrent de façon discriminatoire le même système d'exploitation pour pouvoir être lus, ce qui permet de renforcer indéfiniment le monopole existant.
Toutes ces méthode anti-concurrentielles sont éminnement néfastes à l'économie, spécialement à l'économie des pays européens sur lesquels elles font peser une lourde taxe prélevée par la société américaine Microsoft.
Il me semble que l'incongruité du "camembert" publié méritait d'approfondir ces quelques pistes de réflexion.
Cordialement,
XXX
(1)je ferai juste remarquer que certains articles ont été rédigés avec plus de sérieux que d'autres ; ainsi le volet « Enquête » page 9 omet de préciser que l'étude d'IDC citée à l'appui de Vista a été financée par Microsoft, ce que le volet « Technologies de l'information » page 22 mentionne fort à propos : la question de la pertinence de la source est essentielle à l'information.
(2)
http://richardcazenave.com/?2006/10/03/ ... ceorg#c513(3)ayant donné lieu à une pétition « Non aux racketiciels » qui a déjà récolté 15.000 signatures, initiée par le groupe de travail Détaxe de l'Aful
http://www.racketiciel.info/ (4)notons, sur ce dernier point, que Microsoft a été récemment contraint d'ouvrir le format de sa suite bureautique qui lui a permis de conserver captive sa clientèle toutes ces années, pour pouvoir répondre aux appels d'offre des administrations soucieuses de la pérénnité de leurs documents électroniques – voir par exemple en France le référentiel général d’interopérabilité
http://www.adele.gouv.fr/spip/article.p ... ticle=1064 . Plus généralement, sur la question de l'importance des formats ouverts, v.
http://www.formats-ouverts.org/